Quelle retraite pour les indépendants ? avec Marie Janoviez de Caravel

Quelle retraite pour les indépendants ? avec Marie Janoviez de Caravel

Aujourd’hui sur le blog Wemind, nous accueillons Marie Janoviez, co-fondatrice de Caravel, pour parler d’un sujet qui revient régulièrement chez les indépendants : celui de la retraite.

Dans cette interview, Marie nous apporte ses éclairages sur le fonctionnement du système de retraite des indépendants en France, et surtout nous donne ses conseils pour bien la préparer.

Wemind : Bonjour Marie, pour commencer cette interview, peut-être faut-il repartir de la base, c’est-à-dire le système de retraite en lui-même. Peux-tu expliquer comment il fonctionne, et notamment lorsqu'on est indépendant ?

Marie Janoviez : Le système de retraite en France, pour les salariés comme pour les indépendants, fonctionne selon le principe de répartition. Cela signifie que les travailleurs actifs d’un instant T paient des cotisations qui permettent de verser une pension aux retraités de cet instant T. Lorsqu’ils seront eux-mêmes à la retraite ce seront les actifs de ce moment-là qui paieront leurs retraites.

Il existe 2 régimes obligatoires : le régime général (pour lequel on valide des trimestres) et le régime complémentaire (pour lequel on valide des points). En plus de ces régimes on peut cotiser par soi-même à une retraite complémentaire facultative pour se constituer un complément de revenu.

Depuis 1973, les régimes ont été alignés entre indépendants et salariés. On peut partir à la retraite à partir de 62 ans (sous conditions). La retraite est calculée sur les 25 meilleures années de sa vie professionnelle tous statuts confondus (indépendants et salariés).

Les différences concernent principalement les interlocuteurs (différentes caisses de retraite) et les montants des cotisations. Cela dépend du statut juridique de l’indépendant (micro-entreprise, SAS, SASU, entreprises individuelles,...), de la nature de son activité (artisan, commerçant, professions libérales,...) et de son revenu.

Tu évoquais le fait de valider des trimestres pour ouvrir ses droits à la retraite. Comment ça se passe quand on est TNS ? Quels critères sont pris en compte ?

En tant que travailleur non salarié, il faut toucher un minimum de revenu de 1 585,50 € en 2022 pour valider 1 trimestre et 6 342 € pour valider 4 trimestres. Pour un indépendant assimilé salarié (SAS, SASU) il faut se verser un salaire minimum du même montant (soit 1 585,50 €) en 2022. Ce montant est révisé chaque année.

Après, il y a quelques règles importantes à retenir :

  • Quel que soit le montant du revenu, il n’est pas possible de valider plus de 4 trimestres par an.
  • Il existe un plafond. Quel que soit le montant du revenu, la retraite de base est plafonnée à 1 714 €/mois.
  • Les montants pour un auto-entrepreneur ne sont pas les mêmes, ils dépendent de la nature de son activité.

Justement, peut-on faire un focus sur les micro-entrepreneurs ? Quels sont leurs droits ? Et comment font-ils pour cotiser ?

En tant que micro-entrepreneur les cotisations retraite sont incluses dans le “package” des 22% de charges payées à l’URSSAF. À partir du moment où un chiffre d’affaires est déclaré, le micro-entrepreneur cotise pour sa retraite.

Pour valider un trimestre de retraite en micro-entreprise on prend la base du chiffre d’affaires.

Les montants minimums de CA à réaliser pour valider des trimestres de retraite vont donc être :

Activité

CA annuel pour 1 trimestre 

CA annuel pour 2 trimestres

CA annuel pour 3 trimestres

CA annuel pour 4 trimestres

Commerciale

5 467 €

10 934 €

16 401 €

21 868 €

Artisanale

3 171 €

6 432 €

9 513 €

12 684 €

Libérale

2 402 €

4 804 €

7 206 €

9 608 €

Prenons un exemple pour illustrer ce fonctionnement :

🔎

Julie fait des compositions de fleurs séchées (activité artisanale).
Elle exerce en micro-entreprise.
Elle réalise un chiffre d’affaires de 15 000 € sur l’année N.
Ce montant est supérieur à 12 684 € (nécessaire pour valider 4 trimestres de retraite), elle aura donc validé 4 trimestres en année N.

Par rapport à ce système de retraite, tu mentionnais la possibilité pour chacun de souscrire une retraite complémentaire afin de compléter ses revenus. En quoi est-ce intéressant quand on est indépendant ?

Comme on vient de le voir, en déclarant un chiffre d’affaires, un revenu, vous cotisez à la retraite. Néanmoins, face aux incertitudes sur les réformes, les plafonds et la perte de revenus à venir, nous ne pouvons que vous conseiller de souscrire à une retraite complémentaire à titre individuel.

D'ailleurs, d’après le Conseil d’Orientation des Retraites, on perdra jusqu’à 50% de nos revenus en partant à la retraite, c’est encore plus pour un indépendant. En revanche, soyez attentifs aux frais appliqués sur le contrat ainsi qu’à sa flexibilité.

La retraite, c’est un sujet qu’on peut avoir tendance à procrastiner car ça semble lointain et donc pas urgent. De ton point de vue, à partir de quel moment est-ce important d’y réfléchir ? Et surtout pourquoi ?

Le plus tôt est le mieux ! C’est peut-être contre-intuitif, mais plus on anticipe et plus l’effort est imperceptible. Comment c’est possible ? Grâce à la magie des intérêts composés.

Les intérêts composés, qu’est-ce que c’est ?

L'argent que vous avez placé en année N va vous rapporter des intérêts. La somme en N+1 sur laquelle seront calculés les intérêts de cette même année ne sera plus votre capital mais votre capital + intérêts N.

On obtient donc un effet boule de neige puisque vos intérêts générés vous permettent d'augmenter les intérêts futurs. Petit à petit, les sommes générées s'accumulent et grandissent d'elles-mêmes.

On a essayé d'être le plus clair possible mais voyons cela avec deux exemples, c'est toujours plus parlant.

👩

Camille
- épargne de ses 35 ans à ses 44 ans 150€ par mois sans plus y toucher,
- elle aura mis de côté au total 24 870€
- à ses 70 ans elle aura plus de 144k€.

👨

Thierry
- met de côté 250€ par mois (donc 100€ de plus) de ses 50 à ses 60 ans,
- il aura mis de côté 27k€* (donc plus que Camille)
- il aura seulement 53k€ à ses 70 ans.

👉 L’intérêt courant sur l’épargne anticipée de Camille s’est multiplié de manière exponentielle et la différence est énorme pour un même comportement 15 ans plus tôt, en épargnant pourtant moins par mois.

Lorsqu’on parle d’épargne en général, on pense généralement aussi à l’assurance vie. En quoi est-ce différent de l’épargne retraite ?

Le PER (Plan Epargne Retraite) et l’assurance vie sont deux produits d’épargne dont le fonctionnement se rapproche. Ce sont deux contrats réglementés, souscrits de manière individuelle et facultative.

Les différences principales concernent :

  • l’horizon de placement -> le PER comme son nom l’indique est dédié à la préparation de votre retraite.
  • la fiscalité -> le PER vous permet par exemple de réduire votre imposition à titre personnel ou professionnel, ce qui n’est pas le cas de l’assurance vie.

Ces 2 produits sont complémentaires et s’il est possible, dans un souci de diversification, il est recommandé d’avoir les deux.

Il existe des avantages fiscaux qui encouragent les indépendants à souscrire à des couvertures. C’est notamment le cas pour la mutuelle et le maintien des revenus (prévoyance) avec la loi Madelin. Comment ça se passe pour la complémentaire retraite ?

Le produit de complémentaire retraite “Madelin” (comme le PERCO, PERP, article 83,...) a été remplacé en 2019 par le PER (Loi Pacte), dans un objectif de simplification. Ainsi il n’est plus possible d’ouvrir un contrat Madelin aujourd’hui.

En revanche, le nouveau PER reprend ses caractéristiques. Il est donc tout à fait possible de déduire sa retraite complémentaire individuelle de ses charges comme en Madelin. Les distinctions se font en fonction du statut juridique sous lequel l’activité est exercée.

À savoir : les anciens contrats Madelin peuvent être transférés sur un PER avec des avantages fiscaux jusqu’en 2023.

Pour terminer, aujourd’hui en tant qu’indépendant, comment puis-je calculer ma retraite et simuler combien me coûterait une épargne complémentaire ?

Pour calculer votre retraite de base, la formule à suivre est la suivante :

Où les variables correspondent à :

  • Revenu annuel moyen = les 25 meilleures années de la vie professionnelle (tous statuts confondus)
  • Taux = 50% (pour le taux plein c’est-à-dire si toutes les conditions sont remplies), sinon le taux est inférieur
  • Durée de référence : 172 trimestres

Pour faciliter ce calcul et vous permettre de savoir ce qui s’applique dans votre cas, nous avons réalisé un simulateur chez Caravel qui permet de connaître sa retraite de base et le montant de son épargne complémentaire.

👉 Le lien vers le simulateur Caravel : Calculer ma retraite complémentaire d’indépendant

Merci beaucoup Marie d'avoir répondu à ces questions et d’avoir apporté tes éclairages sur le fonctionnement de la retraite en tant qu'indépendant !

Pour en savoir plus sur Caravel, rendez-vous sur getcaravel.fr